En préparant cet interview, j’avais comme à mon habitude une belle série de questions. Et comme dans toute conversation avec quelqu’un d’aussi captivant, rien ne s’est passé comme prévu. Guillaume Delvigne discute et raconte librement son aventure. Deux heures plus tard, je suis sortie enchantée de cette rencontre passionnante dont je vous livre le récit.
Rencontre avec Guillaume Delvigne
Guillaume débute notre conversation ainsi : “Petit je dessinais déjà. Chez mes grands-parents je m’installais dans le couloir et dessinais au dos de kilomètres de papier-peint”. Il a mis des mots sur cette passion quelques années plus tard et a très vite voulu se lancer dans le design industriel. Étudiant, il est parti en Erasmus en Italie. Expérience qui l’a beaucoup marqué et où il a pu côtoyer des grands maîtres du design. Il décide alors de prolonger son séjour et décroche un stage à Milan dans une agence tenue par un membre de Memphis.
Créations de Memphis Milano.
En vrai passionné, il lance en parallèle un projet de vase en porcelaine. Prémisse de ses activités de designer indépendant.
Guillaume Delvigne pour Industreal (Amazon).
Les créations de Guillaume Delvigne
Ambitieux, Guillaume m’explique qu’il aimerait créer LE produit qui reste, celui qui devient le symbole d’une époque et d’un design. Pour lui le design ultime ne vieillit pas, il est hors du temps.
Guillaume ne crée pas des objets pour qu’ils soient à la mode. Néanmoins, il m’explique qu’on “est forcement influencé par ce que l’on voit, ce que l’on fréquente. Lorsque l’on est designer, la réflexion et l’observation est permanente”. Il prend pour exemple le design de la table de bistro autour de laquelle nous échangeons. “Pourquoi est-elle ronde, à quoi sert l’anneaux de métal qui entour la tranche, et qui abrite un certains nombres de miettes ?”
Ses créations s’inscrivent dans une tendance mais il recherche un design plus pointu et préfère être influenceur qu’influencé. C’est d’ailleurs là tout l’intérêt pour lui de faire appel à un designer. Il faut se laisser influencer mais ne pas avoir 5 ans de retard. “En tant que designer nous sommes sensés être à la pointe des tendances, prévoir les évolutions et sentir les tournants qui vont être pris. Parfois je regarde une de mes créations et je constate qu’après il y a eu plein d’objets qui sont sortis un peu dans la même lignée. Je me dis donc que j’ai pris le bon chemin et choisis les bonnes options. Tant mieux à la limite, si mon design en a inspiré d’autres. Dans la limite du raisonnable bien sûr. Mais pour le moment, je n’ai jamais été confronté à de véritables copies de mes travaux”.
Studio Guillaume Delvigne pour Hermès.
Guillaume travaille sur une multitude de projets en même temps. Mais surtout il a travaillé sur des sujets très larges et pour des secteurs d’activité bien distincts : grande distribution et industriels, petits éditeurs de mobilier, luxe, spiritueux, galériste pour des séries très limitées… Des expériences, qui par leurs niveaux d’exigences et d’encadrement très éloignés, permettent d’apprendre un peu plus chaque jour.
Studio Guillaume Delvigne pour Hartô.
Certaines études lui apportent rapidement une rémunération conséquente, ce qui lui permet de travailler pour des petits éditeurs qui lui apporteront plus de visibilité et une vraie reconnaissance artistique. Au-delà de l’aspect stratégique et financier, la diversité de ses créations correspond parfaitement à sa personnalité. Guillaume aime sortir de sa zone de confort pour apprendre et découvrir toujours plus. Adaptation à un cahier des charges exigeant, à des codes internes, à la charte de la marque, approche d’un nouveau métier, les contraintes de chaque projet lui apporte des nouvelles connaissances.
Ses projets
Dans 10 ans, il aimerait toujours être à la tête de son studio mais cette fois entouré d’une belle équipe pour l’aider à la fois sur le plan administratif mais aussi créatif pour pouvoir se focaliser sur son coeur de métier.
Surement un peu nostalgique de son Erasmus en Italie – et ce n’est pas moi qui en suis étonnée ! – il me répond Alessi quand je lui demande avec quelle marque ou quel éditeur il souhaiterait le plus collaborer.
“C’est une entreprise qui a toujours travaillé avec de bons designers. Alessi propose des produits de la vraie vie et dans lesquels, chacun fois, on voit l’attention particulière qui a été apportée au design. Il produisent aussi en masse ce qui permet de sortir de l’artisanat. J’aimerais travailler sur des produits qui seront fabriqués à plus grande échelle pour avoir accès à des outils et pouvoir faire des formes plus travaillées. Je suis admiratif du travail des frères Bouroullec qui ont collaboré avec les meilleurs de chaque domaine. Ce sont, pour moi, les meilleurs et il travaillent avec les meilleurs. C’est la bonne équation. Ils ont les compétences, le talent et les moyens. J’aimerais travailler avec des semi-industriels pour qui le design est très important, pour ne pas être limité et pouvoir aller plus loin.” conclut Guillaume.